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un mot valise mêlant l'idée de l'emprunt et de l'empreinte.

Empreinter c'est exhumer l'histoire de ces lignes, de ces formes qui sont avant tout la mémoire d'une l'écorce, du tronc, de l'arbre. Ces empreintes ont été collectées dans la forêt des condamnines.

 

Il y avait ce chemin sombre et dense en végétation, que j'ai emprunté, on s'y sentait bien, apaisé. Comme en harmonie avec ce qui composait ce paysage - Mais pourquoi sur ce chemin des traces de grandes roues de tractopelle ? où mène t-il ? Je le suis. Je marche plusieurs kilomètres sur cette terre retrounée et sculptée. Un spectable d'une toute autre nature : immobile et austère se dresse devant moi. la frontière entre ces deux paysages est saisissante. Plus rien ne bouge, tout craque sous mes pas. Les troncs des sapins ne s'élevent plus vers la canopée. le sens de croissance des arbres est renversé. les racines qui s'étendent habituellement horizontalement sont hors sol droites et verticales. les troncs entiers gisent couchés ou coupés sur le sol. Je compte des souches, des troncs de résineux par centaines, alignés sur un quadrillage artificiel. Plusieurs hectares. Sur ce cimetière, la vue est si dégagée que les rapaces diurnes crient en chassant leurs proies  sur ce sol désert. Ce spectacle là, en haut, est splendide. De leur grande envergure, ils dessinent lentement des cercles, leurs échos résonnent contre la paroie rocheuse du site.

 

Je me munis d'une mine de plomb et me salie les doigts d'un gris profond et gras. Une feuille de journal vierge, et je passe le graphite contre le relief des cercles de la souche d'arbre - témoins de dizaines d'années de la vie de cette foret, mémoire des aléas climatiques, des sécheresses, des déluges, des temps doux, du cycle naturel des saisons. Les reliefs apparaissent sur le papier blanc. Les creux restent blanc, seuls les plis sont "empreinter".

 

Je vis au pied de cette forêt. Sur cette fenêtre, j'offre à ces empreintes, la possibilté de s'ancrer dans la métamorphose d'un nouveau paysage, celui qui ne voit que moi : ma chambre. et celui que tout le monde voit : les champs, le village et la forêt, dense vert et fleuri. dernière bribe de vie de ces souches. La lumière qui transperce la feuille révèle les lignes, et modifie les contrastes au gré du mouvement des nuages et des rayons de soleil qui transforment les contrastes.

EMPREINTER

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